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D-SCAN LES EXTRAITS DES RECITS DE LA SF
Tous droits réservés : texte David Sicé,
illustrations : leurs auteurs.
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« Dites ! Si vous regardiez la route ? » Il ricana. « ... C'est bon pour les novices ! Alors, vous vous décidez enfin à ouvrir la bouche ? Je ne comprends pas pourquoi j'ai si peu de clients qui acceptent de discuter ! Je trouve cette attitude fort peu civile ! Ils se contentent de rester immobiles et il y en a même qui prient ! Ah ! Les gens ! Dès que je m'arrête, ils décampent après m'avoir jeté à la face mon argent... » Qu'est-ce que je regrettais d'être monté dans ce truc ! Fermer les yeux n'arrangeait pas les choses. Le chauffeur se moquait que je parle ou non. Il ne me laissait pas en placer une ! « ... Les collègues prétendent que leurs clients veulent aller toujours plus vite ! Les miens veulent que je ralentisse ! Ah ! Je vous le dis ! C'est toute la population qui est complètement folle... » Les pneus crissaient sur l'asphalte. Mes ongles se plantèrent dans ce qui restait de tissu sur la banquette. Félix, lui, s'amusait comme un petit fou. Il tanguait en cadence avec les soubresauts de la voiture. « ... C'est quoi comme animal ? Il a l'air bizarre pour un chat ? Mais il est bien sympathique ? » J'ouvris grand les yeux. Un doute atroce me passa à travers la tête. « Dites, vous voyez bien ? Euh, vous n'avez pas besoin de lunettes ? » Juste à cet instant le taxi passa sous un lampadaire qui éclaira l'intérieur de l'habitacle. Je me décomposai sur place. Ma main droite caressa mon arme. Euh, si je sautais en marche ? « Hum... Je ne voudrais pas paraître vexant ou raciste, mais vous n'êtes pas... entièrement humain, non ? » Je lui adressai mon plus beau sourire. J'avais du mal. Le crâne du chauffeur n'avait pas de peau. L'os était à nu. Un bout de scalp pendait sur ce qui pouvait passer pour une oreille. Les orbites ne recelaient aucun organe... visuel. Je distinguais de vagues mouvements. Des asticots grouillaient sur lui ! Ses mains se prolongeaient par des griffes cassées. Ce que j'avais pris pour une veste mal taillée appartenait en propre à la créature. C'était une paire d'ailes déchiquetées. Sa bouche s'ouvrit sur une rangée de crocs pourris. Il éclata de rire ! « Tout juste mon pote ! Le patron de cette compagnie a trouvé qu'employer des humains coûtait trop cher ! Invoquer des démons mineurs a été sa solution ! » Mon pistolet glissa dans ma main. Je relevai le chien. « Et euh ! Qu'est-ce que tu gagnes toi dans cet arrangement ? Comment es-tu payé ? – Ne me regarde pas de cette manière ! Tu me ferais presque peur ! » Il gloussa. Félix se rapprocha de lui et le renifla. Il rit de plus belle. « Oh ! Les conditions de vie ici sont bien plus agréables que dans nos territoires d'origines ! Aucun de mes frères ne serait assez fou pour vouloir y retourner ! Le boss nous planque de la police qui veut nous expulser, nous loge et nous nourrit ! C'est le paradis ! » Je gloussai à mon tour. Mes nerfs me lâchaient. « Un travailleur clandestin ! Ah ! C'est une idée que je n'aurais jamais eue ! – Tu ne vas pas aller raconter cela à n'importe qui ? Hein ? » Son ton se chargeait d'inquiétude. J'éclatai de rire. « Oh ! J'ai assez de mes ennuis pour ne pas me mêler de ceux des autres! » Il rit avec moi avant de s'étrangler de terreur. Une lueur bleue balaya l'habitacle. « Police ! Stoppez ce véhicule ! »
Tous droits réservés Editions Quid Novi ? / Philippe Halvick
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